S’il faut en croire le vocabulaire des Québécois et des Québécoises, ce peuple ne fait pas l’amour avec moult raffinements d’une exquise sensualité, mais fourre ou se fait fourrer.
Le verbe fourrer, qui exprime familièrement et vulgairement un rapport sexuel, est d’usage très ancien (depuis la fin du XVIIe siècle) et n’est pas exclusif au Québec, mais la population québécoise l’utilise intensivement, tant dans les conversations sur Internet (« Si tu veux des filles qui fourrent le soir même, ben tu dois chercher des filles qui veulent ça aussi* ») que dans la littérature : « Quelle délivrance devrais-je attendre de l’aube fornicatrice ? Le sang grossit mes bourses dont les deux marbres gigotent : “Laisse-toi donc fourrer, Marie”** », écrit le romancier Victor-Lévy Beaulieu.
Aussi, fourrer a engendré d’autres termes. Un homme ou une femme fourrable invite à faire l’acte. « J’ai trouvé et je vous partage le fameux scoop : c’est que les gens sur le Plateau, ils fourrent, et surtout, ils sont intensément fourrables*** », révèle un chroniqueur. (Le Plateau Mont-Royal est un quartier branché de Montréal.)
Le fourrage : l’ensemble des activités sexuelles.
Fourailler : une vie sexuelle avec plusieurs partenaires. (En argot français, fourailler est le fait de se livrer à un rapport sexuel soudain et rapide.)
Tous ces individus sont des fourreurs et des fourreuses, des fourailleurs et des fourailleuses.
Ø Le mot fourrer possède d’autres significations qui n’ont pas de lien direct avec la sexualité, quoique propices à des allusions lourdes de sous-entendus paillards :
- Un fourreur est, au sens premier, un fabricant ou marchand de vêtements de fourrure. Les Québécois peuvent rigoler quand l’un de ces professionnels se présente comme « maître fourreur », le mot fourrer étant étroitement associé au coït.
- On peut fourrer un vêtement (le doubler) ou fourrer une pâtisserie en y introduisant de la crème ou de la confiture. En gros plan, une pâtisserie bien fourrée est presque porno.
- Quelqu’un qui s’est fait fourrer a été dupé ou exploité, l’individu qui l’a arnaqué étant qualifié de fourreur ou de fourreuse : « Ils sont tous pareils les politiciens, pas un meilleur que l’autre. Tous, excusez le mot, des “fourreurs”, quel que soit le parti !**** »
- Fourrant se dit d’une chose qui induit en erreur, qui est trompeuse ou trop complexe : « Ce qui était fourrant un peu c’est qu’on se fiait que sur une seule photo. Pas évident du tout de reconnaître une personne à partir d’une photo.***** »
- Je suis fourré peut exprimer la confusion ou le flou, à l’instar de : « Je suis indécis ».
- Se fourrer un doigt dans l’œil ou d’autres parties de son corps (dans le nez, jusqu’au coude) : se fourvoyer.
- Fourrer son nez partout : se montrer indiscret, envahissant.
- Lancer à quelqu’un : « Va te faire fourrer ! » ou l’inviter à se fourrer quelque chose dans le derrière, c’est l’envoyer promener.
- Fourrer le chien a deux significations. 1) Compliquer une situation, semer la zizanie. « Nous formions un couple parfait jusqu’au jour où une poulette grassette de 5 pieds à peine est venue fourrer le chien dans notre couple, alors que tout allait bien entre mon mari et moi.****** » 2) Gaspiller son temps.
⇒Botte ⇒Couchette ⇒Faire l’acte ⇒Fuck ⇒Petite vite ⇒Scorer ⇒Se faire aller ⇒Sexe, le
*Forum de discussion MONTREALRACING.com, 11 janvier 2017 — lien.
**Beaulieu, Victor-Lévy. Jos Connaissant, Montréal, TYPO, 2001, p. 84.
***Chandonnet, Eric. « Victime de la porn : la haine contre le Plateau », Nightlife.ca, 8 juin 2011 — lien.
****Commentaire d’un internaute à la suite de l’article de Corriveau, Jeanne. « Financement — Harel et son parti ont enfreint la loi électorale », Le Devoir, 7 avril 2010 — lien.
*****« Un retour sur la date avec “SF” », ChezSP4M, 11 avril 2010 — lien.
******Deschâtelets, Louise. « Lettre à toutes les maîtresses du monde », Le Journal de Montréal, 6 juillet 2013 — lien.